De sel et de fumée d’Agathe Saint-Maur : l’histoire d’amour d’une génération sacrifiée

De sel et de fumée, le premier roman d’Agathe Saint-Maur, fait partie de ces livres qui vous prennent aux tripes pour ne plus vous lâcher. Mordant, poignant et tellement renversant que nous tenons le pari que vous n’en décrocherez plus… Alors ? Prêts à embarquer dans le tourbillon d’une passion dévastatrice ?

Paru le 7 janvier dernier aux éditions Gallimard, à l’occasion de la rentrée littéraire de janvier 2021, De sel et de fumée s’est fait remarquer par sa fulgurance. Difficile de croire que ce livre est le premier roman d’Agathe Saint-Maur tant ses mots sont percutants. Pourtant, c’est dans une romance impossible qu’elle nous entraîne à travers ses pages « On ne peut tomber amoureux que de ceux qui sont capables de nous faire revivre le passé et d’imaginer l’avenir, qui nous font étendre les bras d’un bout à l’autre de notre existence ». Une histoire d’amour dont les minutes sont comptées. Une passion dévastatrice qui n’a désormais plus qu’un goût amer de sel et fumée…

En bref, le premier roman d’Agathe Saint-Maur se fait le récit d’un désir ardent rythmé par la mélodie cruelle de la manif pour tous. Mais plus qu’une histoire d’amour passionnée, De sel et de fumée, c’est avant tout le désarroi, l’ouragan d’un deuil douloureux, le puits sans fond d’une haine inexprimable…

Vous pensiez avoir fait le tour de tous les livres d’amour ? Eh bien, détrompez-vous ! Agathe Saint-Maur va vous mettre une claque littéraire à laquelle vous ne vous attendiez certainement pas…

De sel et de fumée : l’histoire d’un amour gay tout de rouge coloré

Rien ne les prédestinait à se rencontrer, à s’entendre ou à s’aimer mais le destin va les réunir de manière inexorable « Nous sommes simplement deux amants dont on essaie de connecter les mauvais pôles. Qui se rejettent éperdument, alors qu’ils sont faits pour être ensemble. Qui se fuient, alors qu’ils sont attirés l’un par l’autre ».

Ils s’appellent Samuel et Lucas et leur amour va dépasser les limites de l’entendement. Les corps s’entrechoquent, les fluides se mélangent, les bouches se rencontrent, les draps se froissent, le désir se consume et l’amour se consomme au creux d’une poésie inattendue « Le corps est la porte d’entrée dérobée du cœur, celle par laquelle on ne voit pas le danger passer. La peau a la mémoire de l’amour bien plus longtemps que les cerveaux ».

Un sentiment sur lequel Samuel n’arrive pas à mettre de mots tant sa puissance dépasse les frontières du langage « Nous sommes les lettres d’un mot dont l’assemblage nous paraît insaisissable quand on s’y penche trop longuement : d’évident, il devient soudain étrange, hasardeux, puis absurde, et même invraisemblable, à tel point qu’on croit qu’on s’est trompés depuis le début, que ça ne s’est jamais écrit comme ça, qu’il vaut mieux tout effacer et recommencer avec d’autres lettres ». Puis bientôt, un coup, du sang, l’absence, le vide et la mort viennent tout remettre en question.

De sel et de fumée : livre amour gay

Les rêves se confondent alors à la réalité et la fumée envahit peu à peu l’esprit de Samuel qui vacille dans les sphères de l’inconscience « Les rêves ont ceci de terrible qu’on n’est jamais certain de leur nature profonde : nul rêveur n’est convaincu qu’il rêve. Le dormeur confond par définition le rêve et la réalité ». Perdu dans ses souvenirs, il nous raconte Lucas avec beaucoup d’incandescence et de larmes. Samuel explore les abysses de son subconscient pour tenter de raviver une flamme qui s’est éteinte. À tout jamais.

En bref, croyez-nous, De sel et de fumée est tout sauf le roman auquel vous vous attendiez ! C’est un livre bouleversant où l’obscurité de l’âme danse langoureusement avec la beauté d’aimer. Une romance homosexuelle ? Oui, mais pas que… Les mots d’Agathe Saint-Maur sont beaucoup trop foudroyants pour décrire une simple amourette. Ils laissent le souvenir impénétrable d’une  histoire d’amour avortée par la haine et la violence.

Agathe Saint-Maur dessine le miroir d’une génération sacrifiée

Si les lecteurs peuvent être décontenancés par le ton très parisien employé par Agathe Saint-Maur au début de son roman, ne vous y fiez surtout pas ! Ce style – presque condescendant parfois – est seulement là pour vous faire tiquer. Et s’il vous dérange, c’est que vous êtes tombés dans le piège de l’autrice…

Au travers de cette histoire d’amour aussi charnelle que fusionnelle, c’est l’homophobie et l’intolérance que choisit d’aborder Agathe Saint-Maur. Mais ne vous attendez pas à un plaidoyer virulent. Ses mots sont de la couleur des sentiments qui unissent les deux protagonistes : sublimes et sanguinaires. C’est en ne nous épargnant aucun cliché qu’elle les déconstruit un à un « Ils ignorent que Lucas et moi ne nous embrassons pas devant les familles, comme si nous étions sales ou contagieux. Ils ne savent pas que chacun de nous a déjà intégré profondément les valeurs bleu et rose qu’ils défendent bec et ongles ». Et tout cela, sans jamais se départir de son envoûtant style poétique. En un mot : inimitable !

Les réminiscences de la manif pour tous pullulent à chaque coin du roman, mais « C’est déjà un souvenir. Les choses qui arrivent sont plus longtemps des souvenirs que des moments présents ». Vous l’aurez compris, là ne réside pas l’essentiel du roman même si cette génération apparaît comme celle de l’entre-deux. Comme si leur amour gay n’avait pas encore le droit d’exister au sein de notre société.

En bref, Samuel et Lucas se font le symbole d’une génération sacrifiée, encore trop enfermée dans des clichés sortis d’un autre temps « Nous n’avions pas besoin d’eux pour croire qu’un garçon, c’est grand, c’est viril, ça drague les filles dans la rue, et que si elles ne répondent pas, c’est rien que des salopes frigides ou mal baisées. Nous le savions. C’est en nous depuis toujours, cette connaissance porte notre corps depuis notre naissance ».

Mais haut les cœurs ! La révolution est en marche et la mort de Lucas s’en fait le triste point de départ… Parce que finalement, Samuel et Lucas sont bien plus que la somme d’idées reçues. Ils sont deux êtres qui se sont aimés à en faire pâlir tous les préjugés

Le livre à lire si vous avez aimé De sel et de fumée : Appelle-moi par ton nom d’André Aciman

Changement de ton, changement d’ambiance, changement de pays. Avec cet incontournable de la romance gay, vous plongerez dans l’Italie de la fin des années 80. Comme chaque année, la famille d’Ezio accueille un jeune universitaire pour aider le père de l’adolescent, professeur de littérature, dans ses recherches. Un coup de foudre ? Presque… Vous connaissez le principe du « fuis-moi, je te suis » ? Laissez-nous vous expliquer…

Call me by your name : amour gay

Aussi fasciné que déstabilisé, Ezio, 16 ans, ne peut s’empêcher d’observer à la dérobée Oliver, ce jeune homme de 24 ans, qui le stimule tant intellectuellement que sensuellement. Si la tension est palpable, ils se retrouvent d’abord autour de la musique et de la littérature. Ces échanges animés donneront lieu à des joutes verbales dignes de celles de Proust – sans mentir ! Aussi puissants que légers, les mots d’André Aciman vous entraîneront dans les dessous d’une passion dont les minutes sont comptées. En effet, Oliver doit repartir aux États-Unis à la fin de l’été… Mais un premier amour, ça ne s’oublie pas. Céderont-ils à la passion qui les habite ?

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