Auteur et diplomate à Boston, Samuel Corvair est l’auteur de La promesse américaine, un thriller qui déconstruit le rêve américain avec minutie pour nous livrer une véritable critique politique et sociale des États-Unis… Un subtil message sur l’Amérique d’hier et d’aujourd’hui que nous lui avons demandé de décrypter !
Né à Nérac dans le Lot-et-Garonne en 1965, Samuel Corvair est un diplomate et musicien qui vit alternativement entre Paris et l’étranger depuis 1986. Également passionné de littérature, il publie La promesse américaine en 2022 aux éditions Plon. Inspiré de faits réels, dont une passion qui aurait pu le mener à sa perte, La promesse américaine se veut un thriller psychologique, mais aussi un roman initiatique, au cours duquel l’auteur sonde son propre passé…
Bonjour Samuel Corvair et merci d’avoir accepté de répondre à nos questions suite à la parution votre livre :
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On dit souvent que publier un livre n’est pas chose facile, que c’est en quelque sorte l’aventure d’une vie. Est-ce que cela a été votre cas pour La promesse américaine?
Oui, c’est vrai. Si on n’est pas une personnalité politique, un acteur, un chanteur ou un sportif connu, publier un livre chez un grand éditeur relève d’un véritable défi. Quand l’équipe de Plon m’a proposé un contrat en 2022 pour La promesse américaine, cela m’a rempli d’une immense joie.
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Quel est l’élément déclencheur qui vous a poussé à écrire ?
J’écris depuis mon adolescence. L’élément déclencheur a été la découverte de Racines (Roots) d’Alex Haley, saga familiale qui raconte l’esclavage d’un Africain, Kunta Kinté, et de ses descendants aux États-Unis. Ensuite il y a eu Marcel Pagnol, Albert Camus, Romain Gary et tous les autres, auteurs célèbres ou pas, hommes et femmes, qui m’ont donné envie d’écrire. Je faisais des fiches de lecture, avec des résumés, et je recopiais des extraits de livres qui m’inspiraient. Toutes mes lectures m’ont nourri et me nourrissent encore.
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Qu’est-ce que cette aventure vous a apporté ?
La publication de La promesse américaine m’a apporté l’épanouissement artistique. Une certaine forme de plénitude. Une libération après tout ce temps passé à croire en un texte qui est devenu un objet parmi mes préférés : un livre. Enfin, grâce à cette publication, je peux m’assumer comme écrivain, ce que je rêvais d’être.
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Vous vivez aux États-Unis, est-ce la raison pour laquelle votre roman se déroule là-bas ? Était-ce une façon de montrer votre vision de l’Amérique d’hier et d’aujourd’hui ?
La première fois que j’ai découvert la Californie, j’avais vingt-trois ans. Comme Dag, le héros de mon livre. Je suis retourné vivre aux États-Unis, pour des raisons professionnelles, très longtemps après, en 2020, cette fois à Boston. Mon roman était déjà écrit, mais il manquait des éléments pertinents que mes éditeurs m’ont aidé à identifier. Et comme trente ans s’étaient écoulés depuis mon « rêve américain, j’ai décidé de décrire ma vision fantasmée de l’Amérique d’hier et d’aujourd’hui.
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Puisque nous parlons de l’« american dream », est-ce que c’est quelque chose en laquelle vous avez cru quand vous êtes arrivés aux États-Unis ?
D’une certaine manière, oui. Le rêve américain est protéiforme. Il se décline dans une multitude de disciplines : musique populaire, cinéma, littérature, sciences, etc. Tout semble possible. Pour le meilleur et pour le pire. Dans le roman, j’ai voulu décrire les deux faces de la même pièce, avec un engrenage qui fait avancer l’histoire.
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On sent la désillusion pointée rapidement chez Dag… mais et vous ? Les États-Unis vous ont-ils déçus ?
Je ne pourrais pas dire ça. Le modèle économique américain se renouvelle sans cesse. C’est ce qui rend ce pays hyperpuissant et attractif pour les immigrants. Mais il y a une telle violence à cause de la vente libre des armes ! C’est une calamité. Sans compter la protection sociale, moins efficace en Amérique qu’en Europe.
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Est-ce une critique sociale et politique romancée qui se cache derrière La promesse américaine ?
Vous parliez de désillusion. La désillusion, c’est le moteur du roman noir. J’aime l’univers de David Goodis, Francis Scott Fitzgerald, Philippe Roth, Bernard Malamud et tant d’autres auteurs américains qui m’ont marqué. J’ai voulu brosser le portrait d’une Amérique fantasmée, celle que j’ai connue jeune, mais qui est peuplée aussi de personnages qui partent à la dérive. Certains survivent, d’autres voient leur rêve s’échouer, faute de talent ou de chance.
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On dit souvent qu’un auteur met beaucoup de sa personnalité dans son premier roman, est-ce votre cas ? Ressemblez-vous à Dag ?
Il y a une part d’autofiction. Forcément. Quand je vivais en Californie, à Irvine, dans le comté d’Orange, je tenais un journal intime. Dès cette époque, je savais que ce serait un matériau intéressant pour en faire un roman. Lequel ? Je ne savais pas. Peu à peu, le pitch du roman a émergé, grâce aux trois personnages principaux, Dag, Joyce, et Warren, qui se sont imposés à moi.
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Pourquoi le genre du thriller ? En lisez-vous beaucoup ?
J’en ai lu quelques-uns, mais je préfère les romans noirs. Dans certains thrillers, ce qui me gêne, c’est le temps accéléré durant lequel le coupable doit être trouvé à toute vitesse. Dans la réalité, ce n’est pas le cas. Le temps s’étend, parfois des années. C’est ce que j’ai tenté de montrer dans La promesse américaine.
Propos recueillis par Manon De Miranda